La variété est considérée comme le “piment de la vie”, mais les niveaux actuels et sans précédent des choix alimentaires permettent-ils d’expliquer les taux explosifs d’obésité ? Certains chercheurs pensent que oui.

Selon le Dr Shelley McGuire : “nous savons depuis des années que les aliments – ainsi que le fait de manger en soi – peuvent provoquer une libération de différents éléments chimiques dans le cerveau, dont certains sont aussi impliqués dans les processus de l’addiction aux drogues et l’abstinence. Et, comme cela peut arriver avec ceux qui abusent de substances, la tolérance ou “l’accoutumance” peuvent survenir, ce qui signifie qu’une utilisation répétée (ici l’exposition à un aliment) est parfois accompagnée par une absence de réponse (dans ce cas une indifférence vis-à-vis de l’aliment).

Les résultats de l’étude d’Epstein et ses collègues apportent un élément nouveau et très intéressant à l’énigme de l’obésité, en suggérant que la monotonie d’un repas conduit en effet à une consommation réduite de calories. Le truc sera d’équilibrer ce concept avec l’importance de la variété pour une bonne nutrition.

Des études ont montré que de nombreuses personnes se désintéressent d’un aliment particulier quand elles sont très souvent exposées à celui-ci. Cette réponse, qu’on appelle l’accoutumance, peut diminuer la consommation calorique à court terme. Inversement, quand on présente une grande variété d’aliments, la consommation calorique peut augmenter. L’”hypothèse de l’addiction à la nourriture” déclare que certaines personnes pourraient trop manger parce qu’elles sont insensibles à la réponse d’accoutumance normale, et ont ainsi besoin d’être plus exposées à un aliment pour provoquer ce désintérêt.

Cependant, il n’y pas encore eu de recherche suffisamment rigoureuse pour étudier si des individus de poids normal et en surpoids avaient des réponses différentes à l’accoutumance, et on en sait peu sur les modèles d’exposition à la nourriture qui sont les plus puissants pour provoquer l’accoutumance. Pour permettre de combler ces déficits de connaissance, des chercheurs ont étudié l’accoutumance à long terme chez des femmes obèses et non obèses. Leurs résultats ont été publiés dans l’American Journal of Clinical Nutrition [1].

Seize femmes non obèses (IMC<30) et seize obèses (IMC>30) ont été réparties au hasard dans deux groupes : le “groupe de la semaine” a participé à des séances expérimentales hebdomadaires d’exposition à la nourriture pendant 5 semaines, tandis que le “groupe quotidien” était étudié tous les jours pendant 5 jours consécutifs.

Pendant chaque séance expérimentale de 28 minutes chacune, on demandait aux sujets de réaliser une série de tâches après quoi elles étaient “récompensées” en recevant une portion de macaronis au fromage de 125 Kcal. Les participantes pouvaient travailler pour autant de nourriture qu’elles le désiraient. Les chercheurs ont alors évalué la consommation énergétique totale.

Alors que l’exposition hebdomadaire augmentait la consommation calorique totale d’environ 30kcal par jour, l’exposition quotidienne réduisait la consommation d’énergie d’environ 100 kcal par jour. Cela confirme l’accoutumance à long terme en termes de consommation calorique. Très peu de différences ont été trouvées entre la façon dont les individus obèses et non obèses répondaient.

Les auteurs de conclure que le fait de réduire la variété des choix de nourriture pourrait représenter une importante stratégie pour ceux qui essayent de perdre du poids. En outre, le fait d’avoir une personne qui se souvient même avoir mangé un aliment donné récemment pourrait être efficace à cet égard.

Dans leur éditorial, Avena et Gold comparent les composants physiologiques de l’hypothèse de l’addiction à la nourriture aux réponses du corps à l’addiction des drogues. Ils ont aussi réfléchit au fait que les plannings des repas dans les écoles et les centres de soins publiques devraient prendre en considération le fait que la diversité des menus n’est pas nécessairement une bonne chose, mais pourrait bien, au lieu de cela, favoriser une trop grande consommation de nourriture et augmenter ainsi l’indice de masse corporelle.

Références :

[1] Long-term habituation to food in obese and nonobese women. American Journal of Clinical Nutrition. Aout 2011, ajcn.009035.

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