Le régime paléolithique, ou régime des cavernes, est un régime à la mode dans lequel ses adeptes font le choix de se nourrir des plantes et des animaux que les hommes de l’âge de pierre étaient supposés manger, mais qui, d’après les chercheurs [1], offrent une grande liberté à ceux qui comptent les calories parce que ces régimes alimentaires ancestraux différaient considérablement dans le temps et l’espace.

“À partir des éléments de preuve que nous avons rassemblés sur plusieurs décennies, il y a très peu de preuves montrant que les premiers hominidés avaient des alimentations très spécialisées ni qu’ils se soient limités à des catégories spécifiques d’aliments qui étaient plus importantes pour eux, à quelques exceptions près”, explique le Dr. Ken Sayers. “Les premiers travaux sur le sujet avaient laissé entendre que les régimes alimentaires des ours et des porcs – qui ont un mode d’alimentation omnivore et éclectique qui varie grandement selon les conditions locales – ont plus de choses en commun avec ceux de nos premiers ancêtres. Or, les données tendent à confirmer ce point de vue.”

L’étude a examiné les preuves anatomiques, paléo-environnementales et chimiques, tout comme les comportements alimentaires des animaux vivants. Alors que les premiers hominidés n’étaient pas de grands chasseurs, et que leur dentition n’était pas optimisée pour exploiter beaucoup de catégories spécifiques de plantes alimentaires, il étaient plus probablement des “touche-à-tout” alimentaires.

L’article de recherche a passé en revue l’évolution hominidé d’il y a 6 millions à 1,6 million d’années environ. Cela concerne le début de l’ère paléolithique qui s’étend de 2,6 millions d’années à environ 10000 ans avant notre ère, mais Sayer déclare que ces conclusions sont aussi valables pour l’évolution humaine plus tardive.

Les chercheurs proposent plusieurs points qui doivent être pris en considération par tous ceux qui désireraient se rapprocher ou imiter l’alimentation de nos ancêtres :

 Il est très difficile de caractériser le régime paléolithique. Les partisans de ce type de régime proposent certains types d’aliments et qu’un certain pourcentage d’énergie doit provenir des protéines, des graisses et des hydrates de carbone. Ces recommandations reposent largement sur des estimations provenant d’un nombre limité de chasseurs-cueilleurs humains modernes, mais l’alimentation des premiers humains était certainement plus vaste.

“Je pense qu’il y a certainement beaucoup de variations qui vont au-delà de ces recommandations”, dit le chercheur. “Quand vous essayez de reconstruire le régime alimentaire de nos ancêtres humains, vous cherchez un certain nombre de choses, comme les habitats dans lesquels ils vivaient, les aliments potentiellement disponibles à cette époque, quelle était la valeur de ces différentes produits alimentaires par rapport à leur contenu en énergie et le temps que cela leur prenait pour se les procurer.”

Il y a plus de temps passé en reconstruction alimentaire que de seulement regarder une dent d’un point de vue chimique ou sous un microscope. Cela implique de caractériser l’environnement et de prendre en considération des facteurs aussi disparates que la mobilité, la digestion et les aptitudes cognitives, dit-il.

 Nos ancêtres vivaient dans une large gamme d’environnements différents, ce qui affectait les types d’aliments disponibles. Les variables importantes pour prendre des décisions d’alimentation ont grandement différé d’un endroit à un autre ainsi que dans le temps, ce qui est fort éloigné des “régimes alimentaires optimaux”, comme cela a été montré par l’écologie évolutionniste moderne. Ceci est clairement observé de nos jours. Les chasseurs-cueilleurs dans un climat du Nord peuvent avoir une alimentation qui soit presque exclusivement animale, tandis que les chasseurs-cueilleurs près de l’équateur pouvaient se nourrir principalement de produits à base de plantes.

 Même les “aliments identiques” ne sont pas les mêmes de nos jours qu’à cette époque. Par exemple, dans une étude précédente, Sayers a étudié l’alimentation des singes langur qui vivent au Népal, dans l’Himalaya. À une certaine époque de l’année, il y avait des fraises sauvages qui semblaient être un aliment de choix. Pourtant, les singes ne les mangeaient pas. Pour les avoir goutées, le chercheur s’est rendu compte qu’elles étaient incroyablement amères.

“Les fraises que nous mangeons ont été sélectionnées pour certaines de leurs propriétés, comme leur taille et leur taux de sucre”, dit-il. “Les aliments que nous mangeons de nos jours, même dans le cas des fruits et des légumes, ont été sélectionnés pour leurs propriétés gustatives et ils diffèrent de ce que nos ancêtres mangeaient.”

 Les premiers êtres humains vivaient beaucoup moins longtemps, ainsi il est difficile de dire si leur alimentation était plus “saine”.

“La grande majorité des individus de l’Âge de Pierre ne vivait pas longtemps. Les espérances de vie sont si élevées de nos jours, du moins dans certaines régions du globe”, dit le chercheur. Beaucoup des maladies qui existent de nos jours ou qui sont associées à une alimentation trop grasse ou riche ont été désignées par certains chercheurs comme des “maladies de l’abondance”. Ce sont des maladies qui sont apparues simplement parce que nous vivons suffisamment longtemps pour qu’elles puissent montrer leurs effets.

Ces dernières années, des études contrôlées ont comparé le régime Paléo à d’autres approches alternatives, et concernant certains problèmes de santé particuliers, les nutritionnistes adoptent dans leur ensemble une attitude plutôt attentiste.

 Nos ancêtres se focalisaient sur leur survie, et pas nécessairement sur une alimentation équilibrée. À travers la grande majorité de notre histoire évolutionniste, le fait d’avoir une alimentation équilibrée n’était pas le problème. Ils essayaient surtout d’avoir suffisamment de calories pour survivre et se pour reproduire. Tout le monde serait d’accord pour dire que l’alimentation des ancêtres ne contenait pas de Cookies, mais ils en auraient certainement mangé s’ils en avaient trouvé sur des arbres !

Références :

[1] Blood, Bulbs, and Bunodonts : On Evolutionary Ecology and the Diets of Ardipithecus, Australopithecus, and Early Homo. Ken Sayers, C. Owen Lovejoy. The Quarterly Review of Biology. Vol. 89, No. 4 (2014), pp. 319-357.

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