Certains sportifs n’hésitent pas à avoirs recours à des appareillages pour pratiquer “un entraînement de leurs muscles inspiratoires” dans l’objectif de renforcer leurs muscles respiratoires. Intuitivement et au premier abord cela semble plutôt sensé : les sports d’endurance obligent les athlètes à respirer très fort, ainsi, quelque-chose qui aide à respirer plus efficacement et à éviter la fatigue des muscles respiratoires pourrait aider à aller plus vite. Mais oubliez l’intuition, car elle n’est pas toujours bonne conseillère, est-ce ça marche vraiment ?

Il existe de nombreuses études sur le sujet, mais elles tendent toutes à avoir été réalisées sur un nombre trop faible de sujets, avec des méthodologies assez médiocres (même les meilleures ne sont pas en double-aveugle), et elles arrivent à des conclusions contradictoires. Une des façons pour arriver à y voir un peu plus clair dans cette quantité d’études est de les associer dans une grande méta-analyse. C’est ce qu’ont fait des chercheurs de l’Université de Colombie Britannique dans le journal scientifique Journal of Strength & Conditioning Research [1]

Voici leurs principales conclusions :

 Il n’y a pas de doutes que l’entraînement des muscles de la respiration renforce les muscles respiratoires, ce qui permet par exemple, d’inhaler avec plus de force.

 Les éléments de preuve suggèrent qu’il est probable que ceci pourrait améliorer la performance sportive dans certains sports et sous certaines conditions qui ne sont pas entièrement claires.

 Cela ne permet pas d’augmenter le VO2max, qui est la quantité d’oxygène que l’on peut délivrer aux muscles pendant l’exercice physique, ainsi toute amélioration résulte d’autres mécanismes.

Voici les données les plus importantes sous la forme d’un graphique tiré de l’étude :


C’est un “graphique en arbre” qui montre l’effet net de l’entraînement des muscles respiratoires sur la performance d’essais contre la montre en (de haut en bas) vélo, aviron, natation, sports d’accélération intermittents et course d’endurance. Les lignes horizontales montrent les études individuelles, tandis que les diamants montrent les totaux pour chaque sport (il y avait quatre études de cyclisme, deux études en natation et une chacune pour le reste).

La toute petite ligne près du bas montre la moyenne globale pour les temps des essais. Ce qui se situe à droite de la ligne du milieu indique que l’entraînement des muscles de la respiration a amélioré la performance du contre la montre ; à gauche cela indique que l’effet a été préjudiciable. Ainsi, l’image globale indique un effet positif, un petit effet, ce qui n’est pas surprenant : virtuellement toutes les améliorations chez les athlètes sont faibles, et un effet qui repose sur des données plutôt clairsemées (les neuf études prises ensembles ne comptaient que 89 sujets).

De façon intéressante, alors que le VO2max n’augmentait pas après l’entraînement des muscles inspiratoires, les évaluations de l’épuisement et de l’essoufflement perçus par les athlètes à un niveau d’exercice physique donné ont diminué. Il y a un certain nombre d’explications physiologiques possibles à cela, mais le résultat semble être que l’entraînement des muscles de la respiration permette de se sentir moins essoufflé (quelque soit la quantité d’oxygène que les muscles utilisent réellement), ce qui permet de pousser un peu plus dur et de courir un peu plus vite.

Il faut noter qu’il y a des côtés négatifs aux méta-analyses comme celle-ci, car elles rassemblent différents sports et différentes circonstances ensembles. La respiration en natation exige déjà d’exhaler contre la pression de l’eau, ce qui est susceptible de renforcer les muscles respiratoires plus que dans les autres sports.

Les rameurs doivent non seulement synchroniser leur respiration avec leur mouvement, mais ils doivent aussi utiliser certains des muscles impliqués dans la respiration pour stabiliser leur torse. Ainsi, certains sports pourraient plus tirer un bénéfice que d’autres, ou bénéficier de différents types d’entraînement de la respiration.

La conclusion actuelle est que les bénéfices d’un entraînement des muscles respiratoires sont loin d’être garantis si vous décidez d’essayer ce type d’entraînement, mais qu’il n’est pas complètement idiot non plus. Enfin, les arguments des vendeurs d’appareils d’entraînement des muscles de la respiration sont évidemment à prendre avec des pincettes.

Références :

[1] Effects of respiratory muscle training on performance in athletes : a systematic review with meta-analyses. Hajghanbari B, Yamabayashi C, Buna TR, Coelho JD, Freedman KD, Morton TA, Palmer SA, Toy MA, Walsh C, Sheel AW, Reid WD. J Strength Cond Res. 2013 Jun ;27(6):1643-63. doi : 10.1519/JSC.0b013e318269f73f.

A lire également