Les hommes peuvent plus penser au sexe que les femmes, mais une étude [1] suggère que les hommes pensent aussi à leurs autres besoins biologiques, comme manger et dormir, plus fréquemment que les femmes.

Et cette recherche jette un discrédit sur le stéréotype persistant selon lequel les hommes penseraient au sexe toutes les sept secondes, ce qui ferait plus de 8000 pensées au sexe dans une journée d’éveil de 16 heures. Dans leur étude, le nombre médian des pensées de jeunes hommes à propos du sexe est d’environ 19 par jour. Les jeunes femmes de l’étude, quant à elles, ont rapporté presque 10 pensées par jour concernant le sexe.

En tant que groupe, les hommes pensent aussi à la nourriture presque 18 fois par jour, et au sommeil 11 fois par jour, comparés au chiffre médian des pensées des femmes sur l’alimentation et le sommeil, qui s’élèvent respectivement à 15 et 8,5 fois par jour.

Les participants étudiants ont dû porter un compteur pour noter leurs pensées soit sur l’alimentation, soit sur le sommeil ou le sexe chaque jour pendant une semaine. Chaque étudiant a été assigné à un seul type de pensée à enregistrer. Avant de recevoir leur compteur, ils ont complété un certain nombre de questionnaires, et on leur a demandé d’estimer la fréquence de leurs pensées quotidiennes sur l’alimentation, le sommeil et le sexe.

Globalement, l’aisance d’un participant vis-à-vis de la sexualité était le meilleur indicateur de la fréquence de ses pensées quotidiennes relatives au sexe.

“Si vous deviez savoir une chose à propos du meilleur indicateur sur la fréquence des pensées sur le sexe d’une personne, ce serait celle de son orientation émotionnelle vis-à-vis de la sexualité, contrairement au fait de savoir s’il s’agit d’un homme ou d’une femme” explique Terri Fisher, de l’Université de l’Ohio et auteure de l’étude. “La fréquence des pensées sur le sexe est associée à des variables qui vont au-delà du sexe biologique.”

Corriger ce stéréotype sur les pensées sexuelles des hommes est important, notait Fisher.

“Il est incroyable de constater la manière dont les gens interpréterons ces statistiques bidons selon lesquelles les hommes pensent au sexe presque continuellement, et beaucoup plus que les femmes” dit-elle. “Quand un homme entend une déclaration de ce genre, il pourrait penser qu’il y a quelque-chose qui ne va pas chez lui parce qu’il ne passe pas autant de temps à penser au sexe, et quand les femmes entendent parler de cela, et si elles passent un temps significatif à penser au sexe, elles pourraient se dire qu’elles ne sont pas normales.”

L’étude a impliqué 163 femmes et 120 hommes âgés entre 18 et 25 ans, qui ont été enrôlés dans un programme de recherche en psychologie. Sur ces derniers, 59 ont été assignés au hasard pour enregistrer leurs pensées à propos de la nourriture, 61 sur le sommeil et 163 sur le sexe. La plupart des étudiants étaient hétérosexuels. L’échantillon de personnes était comparable à celui d’autres recherches antérieures qui avaient impliqué des groupes d’âges chez lesquels les différences entre les sexes face à la sexualité étaient susceptibles d’être les plus importantes.

Avant que le suivi et les enregistrements commencent, les participants ont complété plusieurs questionnaires. Ceux-ci comprenaient une enquête d’opinion sur le sexe pour mesurer leur tendance émotionnelle, positive ou négative, face à la sexualité (érotophilie contre érotophobie) ; leur tendance socioculturelle qui mesure les attitudes à propos du sexe, les comportements sexuels et les niveaux de désirs ; une échelle de désirabilité sociale pour mesurer la tendance des sondés à essayer d’apparaître socialement acceptable ; et un questionnaire sur les habitudes d’alimentation et de sommeil. On leur a aussi demandé d’estimer combien de fois en moyenne par jour ils pensaient au sommeil, à l’alimentation et au sexe.

Les chercheurs ont ensuite donné à chaque étudiant un appareil de comptage, et ont dit à ceux qui devaient enregistrer leurs pensées sexuelles de cliquer sur l’appareil afin d’obtenir un décompte précis de leurs pensées. On leur a expliqué de décompter chaque aspect relatif au sexe : l’activité sexuelle de tout type, les fantaisies et images érotiques, les souvenirs sexuels et les stimuli d’excitation.

Les autres ont reçu pour recommandation d’utiliser l’appareil pour enregistrer leurs pensées à propos des éléments relatifs à l’alimentation comme la nourriture, leur faim, leurs désirs, grignotage et cuisine ; et les pensées à propos du sommeil comprenaient les rêves, le fait de dormir, la sieste, le fait d’aller au lit ou le besoin de repos.

Les questions sur la nourriture et le sommeil ont été réalisées afin de masquer la réelle intention de l’étude, qui était focalisée sur les pensées relatives au sexe, explique Fisher. Cependant, les résultats sur ces pensées supplémentaires permettaient de fournir des informations importantes sur les pensées des hommes et des femmes.

“Etant donné que nous avons analysé d’autres types de pensées relatives aux besoins, nous avons découvert qu’il n’y a pas seulement une différence entre les hommes et les femmes pour ce qui est des pensées sur le sexe, mais aussi pour ce qui est des pensées à propos du sommeil et de l’alimentation” dit-elle. “C’est très significatif. Cela suggère que les hommes pourraient avoir beaucoup plus de pensées de ce type que les femmes, ou qu’ils ont plus de facilités pour identifier leurs pensées. Il est difficile de le savoir, mais ce qui est clair, c’est qu’ils ne passent pas plus de temps à ne penser qu’au sexe, mais aussi à d’autres problèmes relatifs à leurs besoins biologiques aussi.”

Et quand toutes ces pensées ont été prises en compte dans l’analyse statistique, la différence entre les hommes et les femmes dans le chiffre moyen des pensées quotidiennes à propos du sexe, n’était pas plus grande que les différences entre hommes et femmes à propos de leurs pensées sur le sommeil ou la nourriture.

En chiffres bruts, les participants masculins ont enregistré entre une et 388 pensées quotidiennes sur le sexe, comparés à celles des femmes entre une et 144 par jour.

“Pour les femmes, c’est un écart large que de nombreuses personnes attendaient. Et il n’y a aucune femme qui n’ait rapportée aucune pensée sexuelle par jour. Ainsi, les femmes pensent aussi au sexe” dit la chercheuse.

Les données du questionnaire ont apporté des éléments supplémentaires sur les influences des pensées sexuelles. Quand tous les participants ont été analysés ensembles, ceux qui étaient les plus élevés en érotophilie – ou qui avaient la meilleure aisance avec leur sexualité – étaient les plus susceptibles de souvent penser au sexe.

Mais quand l’analyse prenait en considération les hommes et les femmes séparément, aucune variable seule – le score d’érotophilie, les attitudes libertines ou le manque de désir pour être socialement acceptable – ne pouvait être définie comme indicateur de la fréquence de pensée sexuelle chez les hommes.

Mais chez les femmes, le score d’érotophilie restait un bon indicateur de la fréquence des pensées sexuelles. D’un autre côté, les femmes qui avaient un score élevé sur le désir d’être socialement acceptables étaient plus susceptibles de moins penser au sexe.

“Les individus qui donnent toujours des réponses socialement désirables aux questions se retiennent peut-être, et essayent de gérer l’impression qu’ils donnent aux autres” explique Fisher. “Dans ce cas, nous voyons que les femmes qui sont les plus concernées par l’image qu’elles veulent donner tendent à rapporter moins de pensées sexuelles, et ceci est dû au fait que penser au sexe n’est pas compatible avec ce qu’on attend typiquement des femmes.”

Les estimations des participants à propos de la fréquence de leurs pensées quotidiennes sur l’alimentation, le sommeil et le sexe étaient toutes plus faibles que le nombre réel de pensées qu’ils ont enregistré. Cela suppose que les recherches précédentes dans ce domaine – surtout celles concernant les pensées sur le sexe – étaient faibles parce que presque toutes les études précédentes reposaient sur les estimations rétrospectives des participants sur la fréquence de leurs pensées sexuelles.

“Il n’y a pas de bonne raison que notre société croie que les hommes pensent beaucoup plus au sexe que les femmes. Même la recherche qui a été précédemment faite ne confirme pas le stéréotype selon lequel les hommes pensent au sexe toutes les sept secondes” conclut-elle.

 100 Idées tordues sur le corps, la santé, le sexe… Anahad O’Connor.

Références :

[1] Journal of Sex Research.

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