Une recherche permet de développer la première carte cérébrale de l’amour et du désir [1].

Grâce à la science moderne, nous savons désormais que l’amour réside dans le cerveau et non pas dans le cœur, malgré toutes les expressions usuelles qui voudraient nous convaincre du contraire. Mais où cela se situe dans le cerveau ? Est-ce à la même place que le désir sexuel ? Une étude a cherché à dessiner une carte précise de ces sentiments pourtant si intimement ressentis.

“Personne n’a encore mis ensembles ces deux éléments pour en trouver les modes d’activation” explique Jim Pfaus, professeur de psychologie à l’Université Concordia. “Nous ne savions pas ce que nous allions découvrir, les deux pouvaient finir complètement séparés. Il s’avère que l’amour et le désir activent des aires spécifiques mais associées dans le cerveau.”

Avec ses collègues aux États-Unis et en Suisse, Pfaus a analysé les résultats de 20 études séparées qui ont examiné l’activité du cerveau pendant que les sujets réalisaient des tâches comme visionner des images érotiques ou regarder des photos de leurs amoureux. En rassemblant ces données, les scientifiques étaient en mesure de construire une carte complète de l’amour et du désir dans le cerveau.
Ils ont découvert que deux structures cérébrales en particulier, l’insula et le striatum, sont responsables du suivi de la progression depuis le désir sexuel jusqu’à l’amour. L’insula est une portion du cortex cérébral profondément replié dans une aire entre le lobe temporal et le lobe frontal, tandis que le striatum est localisé tout prêt, dans le cerveau antérieur.

L’amour et le désir activent différentes aires dans le striatum. L’aire activée par le désir sexuel est habituellement activée par des choses qui sont par nature désirables, comme le sexe et la nourriture. L’aire activée par l’amour est impliquée dans le processus du conditionnement par lequel les choses associées à la récompense ou le plaisir reçoivent une valeur inhérente. C’est-à-dire, tout comme les sentiments de désir sexuel se développent dans l’amour, ils sont traités dans un endroit différent dans le striatum.

Bien que surprenant, cette aire du striatum est aussi la partie du cerveau qui est associée à l’addiction à la drogue. Pfaus explique qu’il y a une bonne raison à cela. “L’amour est effectivement une habitude qui est formée depuis le désir sexuel quand le désir est récompensé. Il fonctionne de la même façon dans le cerveau, comme quand les gens deviennent accros aux drogues.”

Alors que l’amour peut être une habitude, ce n’est pas nécessairement une mauvaise habitude. L’amour active différentes voies dans le cerveau qui sont impliquées dans la monogamie et dans le fait d’être en couple. Certaines régions cérébrales sont en fait moins actives quand une personne ressent de l’amour que quand elle ressent du désir. “Alors que le désir sexuel a un objectif très spécifique, l’amour est plus abstrait et plus complexe, ainsi il est moins dépendant de la présence physique de quelqu’un d’autre” précise Pfaus.

Selon Pfaus, les neurosciences cognitives ont apporté aux chercheurs une meilleure compréhension de l’endroit où l’intelligence et la résolution des problèmes se situaient dans le cerveau, mais il reste beaucoup à découvrir en ce qui concerne l’amour. “Je vois cette recherche comme une pierre angulaire” dit-il, “et j’espère qu’à sa suite d’autres recherches en neurosciences sociales humaines verront le jour, afin de nous donner une idée de l’endroit où se trouve l’amour dans le cerveau.”

Références :

[1] Stephanie Cacioppo, Francesco Bianchi-Demicheli, Chris Frum, James G. Pfaus, James W. Lewis. The Common Neural Bases Between Sexual Desire and Love : A Multilevel Kernel Density fMRI Analysis. The Journal of Sexual Medicine, 2012 ; 9 (4) : 1048.

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