Ces deux compléments alimentaires utilisés en sport pour contrecarrer l’acidité et la fatigue musculaire sont-ils efficaces ?

Une récente étude publiée dans l’European Journal of Applied Physiology [1], de chercheurs de l’Université Victoria en Australie a étudié deux composés souvent utilisés par les sportifs pour améliorer leur performance : la bêta-alanine et le bicarbonate de soude. Ces deux composés sont supposés fonctionner pratiquement de la même façon : en contrecarrant l’acidité qui s’accroît (i.e. en réduisant le pH ou en augmentant le nombre d’ions d’hydrogène) dans les muscles après un exercice intense.

 La bêta-alanine est transformée dans le corps en substance appelée la carnosine, qui fonctionne dans les cellules musculaires pour garder le pH stable.

 Le bicarbonate de soude, d’un autre côté, apporte des ions de carbonate qui circulent dans le sang, ce qui stabilise les niveaux de pH à l’extérieur des cellules musculaires. Ceci permet ensuite à plus d’ions d’hydrogène d’être évacués des cellules musculaires vers le sang, ce qui a pour effet indirect de stabiliser le pH à l’intérieur des cellules musculaires.

L’une des questions qu’il faut d’abord se poser est : pourquoi est-il si important de stabiliser le pH ? L’hypothèse appelée à la rescousse est que le fait d’augmenter l’acidité causerait des brûlures musculaires associées à un exercice intense et à la fatigue musculaire ; et donc le fait de contrecarrer l’acidité permettrait de s’entraîner plus dur, plus longtemps et plus vite. Mais dernièrement, la réponse est plutôt du genre “nous n’en sommes pas vraiment sûr”. Ce que les auteurs de cet article affirment, c’est que l’augmentation de l’acidité n’est pas la principale cause de la fatigue musculaire, mais qu’elle pourrait tout de même avoir des effets sur la contraction des fibres musculaires.

Dans leur étude, les chercheurs ont eu recours à une conception assez complexe par croisements doubles pour tester leurs résultats avec la bêta-alanine et le bicarbonate de soude, à la fois ensembles et pris isolément, sur huit volontaires sportifs amateurs. Le protocole avec la bêta-alanine a duré six semaines en commençant à 4,8 g par jour et en augmentant jusqu’à 6,4 g/jour pendant les deux dernières semaines ; le protocole avec le bicarbonate de soude était à 300 mg par kilo de poids de corps pris 90 minutes avant de faire du sport. Il y avait principalement deux tests d’exercices sur un vélo stationnaire : un test de sprint répété de 5×6 secondes avec 24 secondes de repos, et un test jusqu’à épuisement qui prenait entre 2 et 2,5 minutes.

Les résultats ont montré qu’il n’y avait pas d’effet significatif dans les tests de sprint répétés. Dans le test jusqu’à épuisement, la bêta-alanine, mais pas le bicarbonate de soude, a apporté un avantage (sur le graphique, BAI représente la bêta-alanine, SB est le bicarbonate de soude et PI est placébo).


Qu’est-ce que ceci nous apprend ? Tout d’abord qu’avec seulement huit sujets, il faut être très prudent concernant les conclusions définitives à tirer. Mais que dans ces conditions particulières, la bêta-alanine semble être un meilleur choix que le bicarbonate de soude.

Il y a cependant un élément intéressant quand on analyse les mesures du lactate pendant et après les tests d’exercice. L’un des bénéfices possibles du maintien du pH à des niveaux relativement constants pourrait être que vous êtes capables de maintenir un effort plus important pendant une fatigue extrême par la production d’énergie anaérobique, ce qui aurait pour conséquence des niveaux plus élevés de lactate (qui est un sous-produit du métabolisme anaérobique) dans le sang. Les résultats concernant le lactate ont en effet révélé des niveaux de lactate plus élevés quelques minutes après le test jusqu’à épuisement – mais seulement dans les conditions du bicarbonate de soude.

Ainsi, le bicarbonate de soude semble modifier le métabolisme anaérobique comme attendu, mais c’est la bêta-alanine qui a stimulé plus efficacement la performance. Comme les auteurs de la recherche le font remarquer : ceci suggère que la bêta-alanine pourrait stimuler la performance par des mécanismes entièrement différents (l’une des possibles explications donnée est que la carnosine est un antioxydant).

Cela ne veut pas dire que le bicarbonate de soude est inutile ; un certain nombre d’autres études a trouvé des bénéfices sur la performance, notamment des exercices qui durent entre 1 et 10 minutes. Cependant, il semble y avoir une large amplitude dans la réaction – cela marche pour certaines personnes, mais pas pour d’autres – ainsi, le seul moyen de savoir si cela fonctionne pour vous est d’essayer en s’entraînant, tout en neutralisant si possible l’inévitable effet d’autosuggestion que toute prise de supplément provoque (effet placébo).

Références :

[1] The effect of β-alanine and NaHCO3 co-ingestion on buffering capacity and exercise performance with high-intensity exercise in healthy males. Danaher J, Gerber T, Wellard RM, Stathis CG. Eur J Appl Physiol. 2014.

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