En utilisant des techniques avancées d’imagerie et des tests cognitifs, des chercheurs ont montré que le fait de faire des têtes de manière répétitive au football augmente le risque de blessures au cerveau et de retard mental. Étude présentée lors de la conférence de la Société Radiologique à Chicago.

Les chercheurs ont utilisé l’imagerie par résonance magnétique de diffusion (IRM de diffusion), qui est une technique avancée d’imagerie, sur 38 joueurs de foot amateurs (d’âge moyen 30,8 ans), et qui jouent tous au football depuis leur enfance. On leur a demandé de se remémorer du nombre fois où ils ont fait des têtes avec la balle ces dernières années (faire une tête consiste à frapper délibérément le ballon avec sa tête).

Les chercheurs ont classé les joueurs à partir de la fréquence des têtes qu’ils ont faites, puis ont comparé les images cérébrales des joueurs ayant fait le plus souvent des têtes avec celles des joueurs restant. Ils ont trouvé que ceux qui faisaient souvent des têtes affichaient des blessures cérébrales identiques à celles qu’on trouve chez les patients atteints de commotion cérébrale, aussi connues comme étant un traumatisme crânien léger.

Les résultats sont particulièrement troublants étant donné que le football est l’un des sports les plus populaires dans le monde, notamment chez les jeunes qui représentent le gros des joueurs. Les ballons de football peuvent se déplacer à une vitesse aussi élevée que 50 km/h chez les amateurs, et plus du double chez les professionnels.

Après avoir confirmé l’impact potentiellement nuisible de têtes fréquentes, “notre objectif était de déterminer s’il y avait un seuil dans la fréquence des têtes qui, quand il était dépassé, résultait en des blessures cérébrales détectables” explique l’auteur de l’étude, Michael Lipton. De plus amples analyses ont montré un seuil d’environ 1000 à 1500 têtes par an. Une fois que les joueurs de l’étude dépassaient ce chiffre, les chercheurs observaient des contusions significatives.

“Alors que le fait de frapper le ballon avec la tête 1000 ou 1500 fois par an pourrait sembler élevé pour ceux qui ne pratiquent pas ce sport, cela ne représente que quelques têtes par jour pour un joueur régulier” observe le Dr Lipton. “Faire une tête avec un ballon de football n’est pas un impact d’une magnitude qui déchirerait les fibres nerveuses dans le cerveau” dit-il. “Mais des têtes répétitives pourraient provoquer une cascade de réactions qui peuvent conduire à une dégénérescence des cellules cérébrales.”

Les chercheurs ont identifié cinq régions, dans le lobe frontal (derrière le front) et dans la région temporo-occipitale (les régions inférieures arrière) du cerveau, qui étaient affectées par des têtes fréquentes – régions du cerveau qui sont responsables de l’attention, de la mémoire, du fonctionnement exécutif et des autres fonctions visuelles d’ordre plus élevé.

Dans une étude associée, le Dr Lipton et ses collègues ont fait passer aux mêmes 38 joueurs amateurs des tests cognitifs pour évaluer leur fonction neuropsychologique. Les joueurs qui avaient la fréquence de têtes la plus élevée par an ont moins bien performé dans les tests de mémoire verbale et de rapidité psychomotrice (des activités qui nécessitent une coordination corps-esprit, comme de lancer une balle) comparés à leurs homologues.

“Ces deux études apportent des éléments de preuve convaincants que les blessures cérébrales et les dégâts cognitifs peuvent résulter des têtes au football à une fréquence élevée” dit le Dr Lipton. “Ces résultats devraient être pris en compte dans le cadre de recherches futures visant à développer des approches pour protéger les joueurs de foot.” Car les têtes représentent une part essentielle du jeu de football, et ne peuvent pas être éliminées de sa pratique.

Étant donné qu’il semble y avoir une limite sans danger de la fréquence des têtes, des recherches supplémentaires pourraient permettre de préciser ce chiffre, ce qui pourra être utilisé pour mettre en place des recommandations. Comme dans les autres sports, la fréquence des actions potentiellement dangereuses dans l’entraînement et le jeu pourrait être enregistrée et limitée à partir de seuils d’exposition confirmés.

“Dans le passé, les lanceurs de balle de la Little League de Baseball ont vu le taux de blessures à l’épaule s’envoler dans des proportions alarmantes” note Lipton. “Mais des recherches ont permis de mettre en place différentes approches, comme des limites du nombre de lancers par les enfants, qui ont substantiellement réduit l’incidence de ces blessures.”

“Les blessures au cerveau dues aux têtes, si elles se confirment, pourraient ne pas se voir car les dégâts ne sont pas immédiats et peuvent facilement être attribués à d’autres causes comme des troubles du déficit de l’attention/hyperactivité ou des difficultés d’apprentissage” dit Lipton. “Il faut davantage d’études pour définir avec précision l’impact d’un nombre excessif de têtes sur les enfants et les adultes, afin de développer des paramètres à l’intérieur desquels les footballeurs pourront jouer sans danger sur le long terme” conclut-il.

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