Qu’est-ce qui limite vos muscles quand vous commencez à courir ?

Lorsque vous êtes sur la ligne départ, vos muscles n’utilisent pas beaucoup d’énergie. Puis, le coup de feu annonce le départ de la course, et ils se mettent tout à coup à brûler beaucoup d’énergie. Cela prend du temps à votre corps pour comprendre ce qui lui arrive afin qu’il puisse répondre à cette demande brutale d’énergie, et actionner la pompe du cœur et des poumons, dilater les vaisseaux sanguins utiles et pour que les réactions métaboliques dans les cellules musculaires fonctionnent à plein régime.

Pendant cette période de transition, vous vous reposez sur “l’énergie empruntée” des stocks de phosphocréatine et des processus anaérobiques. C’est ce que les chercheurs appellent la “cinétique VO2” : la rapidité à laquelle vous pouvez atteindre votre plus efficace système d’énergie aérobique pour courir à pleine capacité. Le fait d’optimiser votre cinétique VO2 en vous échauffant pile comme il faut peut, par exemple, économiser un peu d’énergie et minimiser la fatigue.

Mais qu’est-ce qui cause cette réponse différée du début ? C’est un sujet de recherche depuis plusieurs années qui se focalise sur deux possibilités fondamentales : soit vos muscles ne peuvent pas avoir assez d’oxygène pendant cette période transitoire, soit ils en ont assez mais ils ne peuvent pas l’utiliser. Une nouvelle étude de chercheurs de l’Université de l’Utah, publiée dans Medicine & Science in Sports & Exercise [1], a étudié cette question sous un autre angle, en ayant recours à la spectroscopie par résonance magnétique pour évaluer les niveaux d’oxygène et de phosphocréatine à l’intérieur des cellules musculaires pendant l’exercice physique. Cette technique permet d’apporter des réponses plus directes que les études précédentes qui utilisaient des techniques indirectes comme la spectroscopie infrarouge des flux sanguins.

La spectroscopie par résonance magnétique est associée à l’imagerie IRM, mais au lieu de créer des images, elle mesure les concentrations relatives des différentes molécules. Dans ce cas, elle mesure la phosphocréatine (l’approvisionnement en énergie “instantanée” dans les cellules musculaires qui peut fournir de la puissance pendant environ dix secondes) et la déoxymyoglobine (la myoglobine liée à l’oxygène dans les cellules musculaires ; quand les niveaux d’oxygène à l’intérieur des cellules diminuent, la quantité de myoglobine qui n’est pas associée à l’oxygène – la déoxymyoglobine – augmente). Les mesures ont été prises pendant des exercices de flexion plantaire modérés et intenses (i.e. le pied) pendant que les jambes des sujets étaient positionnées à l’intérieur d’un IRM.

Voici ce que les mesures de déoxymyoglobine donnaient après le début de l’exercice modéré :


L’élément remarquable ici est que les niveaux ne commencent pas à s’élever (ce qui signifie que les niveaux d’oxygène dans les cellules musculaires ne commencent pas leur chute) avant six secondes après le début de l’exercice (alors que la phosphocréatine chute immédiatement). Cela montre qu’il n’y a pas de pénurie d’oxygène dans les cellules musculaires – l’approvisionnement différé via le cœur, les poumons et les vaisseaux sanguins ne sont donc pas la cause de ce retard. Au lieu de cela, “l’inertie métabolique” apparait être le coupable : les réactions métaboliques à l’intérieur des cellules des muscles qui produisent l’énergie aérobique prennent du temps pour se lancer.

Les subtilités de la cinétique VO2 sont surtout pertinentes pour les courses sur une distance moyenne, qui exigent un départ rapide mais qui reposent sur une contribution aérobique importante. De nouveau, il faut garder cela à l’esprit même quand on s’échauffe avant des entrainements par intervalles. Il est inutile de s’essouffler ou de s’épuiser pour être prêt, car certains des changements clés ont lieu à l’intérieur des muscles. Un échauffement modéré de plusieurs séries de 400 mètres quelques minutes avant le départ de la course permettra de se sentir mieux sans se fatiguer.

Références :

[1] Med Sci Sports Exerc. 2015. MRS Evidence of Adequate O2 Supply in Human Skeletal Muscle at the Onset of Exercise. Richardson RS, Wary C, Walter Wray D, Hoff J, Rossiter H, Layec G, Carlier PG.

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