Si vous vous déplacez en vélo ou pédalez pour le plaisir, assurez-vous de ne pas pédaler trop rapidement. C’est le conseil que donne un groupe de physiologistes qui a trouvé que les gens dépensent plus d’énergie qu’il est nécessaire quand ils pédalent furieusement, exceptés chez les cyclistes de haut niveau. Les chercheurs sont arrivés à cette conclusion en développant une équation pour décrire la performance cycliste, dont ils affirment qu’elle pourra aider les gens à rester en meilleure forme.

Pratiquement tous les vélos disposent désormais d’une installation qui empêche de trop pédaler : le dérailleur. Les muscles travaillent mieux quand ils se contractent ni trop rapidement ni trop lentement. Pour vous déplacer rapidement, vous utiliserez moins d’énergie avec une vitesse au dérailleur plus élevée, même s’il faudra appuyer plus dur sur les pédales, car les muscles des cuisses sont plus efficaces quand ils travaillent à des taux de contraction plus bas. De même que des vitesses au dérailleur plus basses sont meilleures sur une route en pente parce qu’elles vous empêchent de pédaler plus lentement qu’il le faudrait.

Pour savoir comment les taux de pédalage affectent précisément la consommation d’énergie, le physiologue Federico Formenti de l’Université d’Oxford au Royaume-Uni et ses collègues ont étudié comment dix hommes d’âges et de conditions physiques différents ont performé lors d’un exercice de cyclisme. Chaque cycliste pédalait de plus en plus rapidement contre des forces variables avec un masque qui enregistrait la quantité d’oxygène qu’il consommait – qui est une mesure du taux métabolique.

Les chercheurs ont réalisé 160 mesures de ce genre (16 pour chaque participant), et les ont comparées aux taux de consommation d’oxygène prédites par l’équation qui est recommandée et utilisée par l’American College of Sports Medicine (ACSM). Cette équation implique seulement deux variables : la masse du cycliste et son “taux d’effort”, égale à la force de résistance de l’exercice sur le vélo multipliée par la distance que le vélo ferait s’il n’était pas fixé au sol.

Les chercheurs ont trouvé qu’ils pouvaient avoir une meilleure correspondance avec les valeurs de la consommation d’oxygène observées en modifiant cette équation pour y ajouter une troisième variable : le taux du pédalage [1]. L’équation actuellement utilisée estime plutôt bien la consommation d’oxygène la plupart du temps, car elle fonctionne pour des taux d’effort qui incluent déjà le taux de pédalage. Mais cette équation n’arrive pas à saisir le coût relatif imposé par la force de résistance et le taux du pédalage. En fait, les chercheurs ont trouvé qu’à des taux de pédalage élevés et à des taux d’effort faibles, les participants du test utilisaient la plupart de leur énergie seulement pour actionner leurs jambes. La réponse physiologique des muscles à l’exercice est très différente s’ils les contractent lentement contre une résistance plus importante, par rapport au fait de les contracter rapidement contre une faible résistance.

La consommation d’oxygène pendant l’exercice est souvent utilisée pour mesurer la condition physique. Les chercheurs déclarent que la nouvelle équation devrait améliorer l’enregistrement de la condition physique dans les salles de sport qui ne pas équipées d’appareils pour analyser directement la respiration. Ils préviennent que les résultats de leur groupe doivent cependant être confirmés par des études plus importantes sur d’autres sportifs, y compris des femmes, mais ils notent que les données provenant d’études précédentes sur un total de 50 cyclistes donnent une bonne correspondance des valeurs de la consommation d’oxygène avec la nouvelle équation.

D’autres scientifiques du sport font remarquer qu’il est juste d’ajouter le taux de pédalage dans les équations visant à décrire la performance cycliste, mais ils ajoutent que cette nouvelle équation est relativement simpliste car elle ne prend pas en compte les différences individuelles de l’efficacité des fibres musculaires ni le choix du taux de pédalage. Les chercheurs reconnaissent que ces variations vont au-delà du cadre du groupe de leur étude, mais ils ajoutent que cela peut expliquer pourquoi les cyclistes de haut niveau et/ou professionnels pédalent plus efficacement même quand ils pédalent très rapidement.

Mais la raison expliquant pourquoi il faudrait plutôt que les cyclistes dits “amateurs” pédalent plus lentement ne semble pas connue. Les chercheurs pensent que cela est dû à ce qu’ils nomment le “travail interne”, qui est l’énergie que les cyclistes consomment quand ils font bouger leurs jambes de bas en haut, distincte du “travail externe” qui propulse le vélo en avant. Les chercheurs ont mesuré le travail interne pendant leurs tests en traquant le mouvement de pédalage grâce à des faisceaux infrarouges envoyés en direction du corps du cycliste. Ils ont découvert que le travail interne était dix fois plus important quand un cycliste augmentait son taux de pédalage de 50 à 110 révolutions par minute, et ceci quel que soit le travail externe effectué. Il en résulte qu’un homme de taille moyenne qui pédale à un taux plus élevé utilisera environ 60 % de son énergie à actionner seulement ses jambes.

D’autres cependant ne sont pas d’accord avec cette interprétation. Ils sont d’accord avec le fait que les estimations de la consommation d’oxygène doivent être prises en compte dans le taux de pédalage, mais ils déclarent que la raison n’a rien à voir avec le travail interne. Le travail interne et externe ne sont pas des “quantités indépendantes qui s’additionnent”, disent-ils, car le premier génère le second dans une certaine mesure. Au lieu de cela, l’effet du taux de pédalage est probablement dû à des subtilités de la dynamique des muscles.

Références :

[1] Pedaling rate is an important determinant of human oxygen uptake during exercise on the cycle ergometer. Federico Formenti, Alberto E. Minetti, Fabio Borrani. Physiological Reports, 2015, Vol. 3 no. e12500.

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