Pour stimuler l’énergie aérobique est-il préférable de courir plus loin ou plus vite ?

Pendant un exercice aérobique, la plupart de l’énergie des cellules musculaires provient des mitochondries, qui sont un composant cellulaire dont on parle souvent comme des “centrales énergétiques” des cellules. C’est la raison pour laquelle l’un des éléments clé de l’entrainement est de développer plus et mieux le fonctionnement mitochondrial pour alimenter les efforts réalisés.

Mais comment les mitochondries réagissent à l’entrainement sportif ? Y a-t-il un stimulus d’entrainement optimal qui déclenche la formation de nouvelles et plus puissantes mitochondries ? Comme des chercheurs l’ont expliqué il y a quelques années [1], il y a ici deux questions reliées. Premièrement, combien de nouvelles mitochondries les cellules peuvent-elles faire croitre ? Deuxièmement, quelle est l’efficacité de chaque unité de mitochondrie pour ce qui est de fournir l’énergie nécessaire aux contractions musculaires ?

La réponse la plus sûre est que nous n’en savons pas plus ni avec certitude sur ce sujet. Mais plusieurs études sur des rats et des êtres humains, dont une publiée par ces mêmes chercheurs [2], suggèrent la règle empirique suivante : la quantité d’entrainement physique réalisée détermine la quantité de mitochondries que les cellules vont contenir ; et l’intensité de l’entrainement détermine la puissance de chaque unité de mitochondries.

Dans le cadre d’une étude assez récente, ni un entrainement continu juste sous le seuil, ni des entrainements avec des intervalles longs de 4 – 7 x 4 mn à 90 % de la puissance maximale (le niveau de puissance le plus élevé dans un test VO2max sur un vélo stationnaire) n’ont changé le fonctionnement mitochondrial, mais des sprints de 4 – 10 x 30 secondes à 200 % de la puissance maximale ont stimulé le fonctionnement mitochondrial. Il faut cette intensité très élevée pour booster le rendement de chaque mitochondrie. D’un autre côté, aucun des entrainements réalisés trois fois par semaine n’a augmenté la quantité globale des mitochondries après quatre semaines.

Au contraire, une autre étude par les mêmes chercheurs a fait faire des entrainements par intervalles à des participants deux fois par jour, sept jours par semaine pendant trois semaines. Cette fois-ci, un marqueur de la quantité de mitochondries a augmenté de 40 %. En d’autres termes, pour obtenir plus de mitochondries il faut accumuler du volume.

Comme les chercheurs l’ont fait remarquer, ces résultats correspondent parfaitement au paradigme de “l’entrainement polarisé” observé par Stephen Seiler, qui est l’idée selon laquelle les meilleurs athlètes d’endurance accumulent généralement des volumes importants d’entrainement à des intensités relativement faibles, mais incluent aussi une petite quantité, entre 10 % et 20 % du total, à des intensités très élevées. L’association d’un volume important et d’une intensité élevée (mais pas en même temps) apporterait vraisemblablement aux athlètes de grandes quantités de mitochondries très puissantes.

Une autre étude [3] a affiché des données qui ont comparé 30 minutes d’entrainement continu avec un entrainement par intervalles difficiles de 4 x 5 mn à 65 % de la puissance maximale, et 2 mn 30 de récupération, à des intensités sélectionnées pour que les deux groupes fassent la même quantité de travail au total.

L’une des choses remarquables dans cette étude était que les entrainements n’étaient pas assignés à différentes personnes – au lieu de cela, ils étaient répartis sur différentes jambes des mêmes individus ! En utilisant un système de pédalage sur une seule jambe, tous les facteurs extérieurs, depuis les variations génétiques au stress et jusqu’à l’alimentation, restaient constants pour chaque comparaison.

Après six entrainements sur une période de deux semaines, la jambe qui avait suivi un entrainement par intervalles a obtenu les améliorations les plus importantes à la fois pour ce qui est de la quantité de mitochondries, ainsi qu’en ce qui concerne le fonctionnement de chaque mitochondrie par rapport à la jambe qui s’était entrainée de façon continue. Cela est en phase avec l’idée selon laquelle l’intensité est ce qui déclenche les améliorations dans le fonctionnement, mais ça ne colle pas avec l’idée que la quantité de mitochondries dépend du volume d’entrainement, étant donné que les deux jambes ont réalisé la même quantité d’entrainement.

Comment réconcilier ces deux choses en apparence contradictoires ? Avec davantage d’études. L’image ne sera sans doute jamais aussi simple que de dire “l’intensité fait une chose et le volume fait autre chose,” mais il se peut que cette tendance générale reste vraie.

Références :

[1] Biochim Biophys Acta. 2014 ; 1840(4):1266-75. 2013. Can we optimise the exercise training prescription to maximise improvements in mitochondria function and content ?

[2] FASEB J. 2016 Feb ;30(2):959-70. Epub 2015. Training intensity modulates changes in PGC-1α and p53 protein content and mitochondrial respiration, but not markers of mitochondrial content in human skeletal muscle.

[3] Mitochondrial Adaptation To Training : Superior Effect Of Interval Versus Continuous Exercise When Work Is Matched. Martin J. MacInnis, Maria E. Haikalis, Brian J. Martin, Lauren E. Skelly, Jenna B. Gillen, Mark A. Tarnopolsky, Martin J. Gibala. McMaster University, Hamilton, ON, Canada.

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