Des chercheurs ont découvert que certains athlètes qui prennent part à des sports d’endurance aussi extrêmes que des marathons, des triathlons d’endurance, des courses de vélo en montagne ou des ultra triathlons, pourraient subir des dégâts dans le ventricule droit de leur cœur, l’une des quatre chambres du cœur impliquée dans le pompage du sang dans tout le corps.

La recherche, publiée dans l’European Heart Journal [1] a découvert que bien que les dommages étaient réversibles en l’espace d’une semaine chez la plupart des 40 athlètes étudiés, cinq d’entre eux (13%) ont présenté des preuves de dégâts plus permanents, via l’imagerie par résonance magnétique (IRM) qui a montré des cicatrices au muscle cardiaque (connus comme étant des fibroses). Ces cinq sportifs faisaient des compétitions de sports d’endurance depuis plus longtemps que ceux qui n’avaient pas les mêmes dégâts.

Le Dr André La Gerche de l’Université de Leuven en Belgique ajoute : “Il est important de ne pas sur-extrapoler nos résultats en concluant que le sport est mauvais à la santé. Nos données ne disent pas cela.” Cependant, il déclare que les résultats suggèrent qu’il pourrait y avoir des athlètes qui pourraient être nés avec une susceptibilité de développer des blessures résultant d’un sport d’endurance à long terme.

“Virtuellement, toutes les modifications dans les cœurs des athlètes ont été résolues une semaine après avoir pris part à la compétition sportive. Chez la plupart des athlètes, une association d’entraînement raisonnable et de récupération approprié peut améliorer la fonction cardiaque ; c’est-à-dire que le coeur se reconstruit d’une façon telle qu’il sera davantage en mesure d’endurer un exercice identique dans le futur. “

“Cette réaction positive à l’entraînement peut se faire sur des mois plutôt que des années” explique-t-il. “La question issue de notre recherche est de savoir s’il y a des athlètes chez lesquels le sport extrême pourrait causer des blessures à partir desquelles le coeur ne récupérera pas complètement. Si cela est vrai, les athlètes affectés pourraient risquer de sous-performer – syndrome du surentrainement cardiaque – ou cela pourrait causer des arythmies. Si cela se produit, c’est susceptible de ne toucher qu’une minorité de sportifs, particulièrement ceux chez lesquels un entraînement plus intense n’arrivera pas à aboutir à une amélioration des performances.”

Le Dr La Gerche et ses collègues ont recruté 40 athlètes d’élite en Australie qui avaient prévu de réaliser l’une des quatre compétitions d’endurance [2]. Les athlètes étaient déjà bien entrainés (entraînement intensif pendant plus de 10 heures par semaine), étaient bien classés (ils finissaient dans les 25% premiers dans leur domaine) et n’avaient pas de problèmes cardiaques connus.

Les chercheurs ont étudié les athlètes en utilisant l’échocardiographie, l’IRM et des tests sanguins à trois étapes : durant les trois week-ends avant la course, immédiatement après la course (dans l’heure qui suivait) et 6 à 11 jours après la course.

Les résultats ont montré qu’immédiatement après la course les cœurs des athlètes ont changé de forme, leur volume a augmenté, tandis que la fonction du ventricule a diminué. Les niveaux d’un élément chimique appelé le peptide natriurétique de type B (PNB), qui est sécrété par les ventricules en réponse à un stress excessif des cellules du muscle cardiaque, ont augmenté. La fonction du ventricule droit a récupéré chez les plupart des athlètes une semaine plus tard, mais chez cinq d’entre eux qui se sont entrainés et ont fait de la compétition plus longtemps que les autres, l’IRM a détecté des signes de blessures (fibrose). Les chercheurs ont aussi découvert que les modifications après la course de la fonction du ventricule droit ont augmenté avec la durée de la course.

Au contraire, le ventricule gauche, qui jusqu’à maintenant a été le plus étudié chez les sportifs, n’a pas montré de modifications.

Le Dr La Gerche de déclarer : “notre étude identifie le ventricule droit comme étant celui qui est le plus susceptible de blessures dues au sport, et suggère que ce ventricule devrait être le centre d’intérêt pour déterminer la signification clinique de ces résultats. Des études à venir plus grandes et en différents endroits sont nécessaires pour élucider si le sport extrême peut favoriser l’arythmie chez certains athlètes. Pour faire une analogie, certains joueurs de tennis développent une épicondylite latérale. Cela ne veut pas dire que le tennis soit mauvais pour vous, mais plutôt que cela identifie une zone de susceptibilité sur laquelle concentrer un traitement et des mesures préventives.”

Il conclut : “il est important de noter que c’est l’un des ingrédients d’une compréhension de la façon dont le ventricule droit est un ’talon d’Achille’ de la fonction cardiaque pendant le sport. Nous avions déjà étudié la fonction cardiaque pendant un exercice intense, et démontré que le fardeau sur le ventricule droit (stress, travail et demande en oxygène) augmentait de manière plus importante que dans toute autre chambre du coeur.”

“Le Professeur Heidbuchel a montré que la source de l’arythmie ventriculaire chez les athlètes touchés est presque toujours le ventricule droit. Enfin, il a été montré que le sport intense chez les rats causait une inflammation, une fibrose et une arythmie dans le ventricule droit mais pas dans le gauche. En conséquence, il y a des messages cohérents qui impliquent tous le ventricule droit et pourtant il a été négligé dans la grande majorité des études sur les modifications cardiaques chez les athlètes.”

Enfin, dans un communiqué de presse, le Professeur a déclaré que son sentiment était que le sport d’endurance extrême cause probablement des dégâts au coeur de certains athlètes. Le corps n’est pas fait pour faire du sport pendant 11 heures de suite, ainsi les dommages au coeur ne sont pas invraisemblables, et certains athlètes peuvent être prédisposés à vivre un problème de ce genre.

Références :

[1] Exercise induced right ventricular dysfunction and structural remodelling in endurance athletes. European Heart Journal. doi:10.1093/eurheartj/ehr397

[2] Les distances de chaque événement étaient les suivantes : marathon=42,2 kms ; triathlon d’endurance =1,9 km de natation, 90 kms de vélo, 21,1 kms de course à pieds ; vélo alpin=207 kms ; ultra triathlon=3,8 kms de natation, 180 kms de vélo, 42,2 kms de course à pieds.

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