La plupart d’entre nous vivons plus vieux, mais un facteur important doit être pris en considération : le fait de savoir si ces années supplémentaires d’espérance de vie sont des années vécues en bonne santé. Il y a beaucoup de preuves montrant que nos muscles jouent un rôle très important pour notre santé quand on vieillit, et la force de la poigne est une bonne façon de mesurer comment fonctionnent nos muscles.

De nombreuses études ont montré que les individus qui ont une poigne qui est faible quand ils vieillissent sont plus susceptibles de développer des problèmes de santé tels qu’une perte de leur indépendance [1] – en devenant incapables de réaliser certaines tâches par exemple – mais la faiblesse de la force de la poigne est aussi associée à un décès prématuré [2].

La force de poigne se construit pendant l’adolescence pour atteindre son apogée dans la trentaine, puis diminue graduellement. Mais il est important de l’étudier durant toute la vie, car elle peut être un indicateur du style de vie ou de facteurs environnementaux qui peuvent avoir une influence – par exemple, il a été montré que ceux qui sont physiquement plus actifs vers la quarantaine ont une force de poigne supérieure dans ils vieillissent [3].

Mais il y a relativement peu d’informations concernant tout l’éventail d’une force de poigne normale durant la vie, les études existantes tendent à se focaliser sur la quarantaine et au-delà [4]. Mais des chercheurs ont décidé d’étudier cela plus largement, en se servant de plusieurs études qui ont inclus la force de la poigne comme élément faisant partie de leurs évaluations.

Dans une étude publiée dans le journal PLOS ONE [5], ils ont combiné l’information provenant de 49964 participants dans 12 études afin de produire des graphiques de référence concernant la force de la poigne chez des personnes âgées de quatre ans à 90 ans.

Les résultats ont montré qu’il y a trois périodes globales pour ce qui concerne la force de poigne dans la vie : une augmentation jusqu’à son apogée au début de la vie adulte, un maintien de cette force jusqu’à environ 40 ans, puis un lent déclin à partir ou après la quarantaine. Les hommes et les femmes ont la même force de poigne pendant leur enfance, mais à partir de l’adolescence les hommes deviennent physiquement plus forts en moyenne que les femmes. Les hommes comme les femmes atteignent leur pic de force vers 30 ans, quand la force de poigne moyenne des hommes est de 51 kg, elle est de 31 kg chez les femmes.

Les graphiques de référence ci-dessous montrent que durant la période de l’apogée, la grande majorité des hommes ont une force de poigne à plus de 27 kg et la grande majorité des femmes a une force de poigne à plus de 16 kg. Ces valeurs sont utilisées comme valeurs limites permettant d’évaluer une faiblesse de la force de la poigne, et afin de chercher à savoir quelle proportion de gens doit être classée dans la catégorie de ceux qui ont une faiblesse à ce niveau selon leur âge.


Comme on pouvait s’y attendre, la faiblesse de force de la poigne devient de plus en plus fréquente avec l’âge, où environ un quart des gens de plus de 80 ans tombe sous les niveaux limites.

De nos jours, la force de poigne n’est pas suffisamment mesurée comme élément constitutif de l’évaluation de la santé d’une personne âgée. Cependant, la reconnaissance de plus en plus fréquente d’une condition clinique fréquente appelée la sarcopénie, qui est la perte de la masse musculaire et du fonctionnement des muscles avec l’âge [6] dans laquelle un mauvais fonctionnement musculaire est démontré soit par une faiblesse de la force de la poigne soit par une démarche ralentie, est susceptible de changer cela.

La recherche sur la sarcopénie et ses traitements augmente incroyablement [7]. Le traitement ayant actuellement les meilleures preuves d’efficacité est le recours à un programme d’entrainement d’exercices de musculation avec charges progressives, qui augmente graduellement la charge qu’un muscle peut supporter, ce qui le rend de plus en plus fort avec le temps. À cela s’ajoute aussi des interventions nutritionnelles voire certains médicaments.

Tout comme le rôle de la force de la poigne dans le diagnostic de la sarcopénie chez une personne âgée, le fait d’étudier la force de poigne durant toute la vie permet de mieux comprendre l’importance du style de vie plus tôt, et les interventions potentielles à mettre en place qui amélioreront la qualité de la vie, et la santé, en vieillissant. Comme nous vivons plus longtemps, c’est un moyen qui pourrait permettre de passer ces années supplémentaires en meilleure santé.

Références :

[1] Predicting ADL disability in community-dwelling elderly people using physical frailty indicators : a systematic review. Joan Vermeulen, Jacques CL Neyens, Erik van Rossum, Marieke D Spreeuwenberg, Luc P de Witte. BMC Geriatrics 2011, 11:33.

[2] Objectively measured physical capability levels and mortality : systematic review and meta-analysis. BMJ 2010 ; 341.

[3] Physical activity levels across adult life and grip strength in early old age : updating findings from a British birth cohort. Age Ageing (2013) 42 (6) : 794-798.

[4] Normative Values of Cognitive and Physical Function in Older Adults : Findings from The Irish Longitudinal Study on Ageing. Journal of the American Geriatrics Society. Volume 61, Issue Supplement s2, pp S279–S290, 2013.

[5] Dodds RM, Syddall HE, Cooper R, Benzeval M, Deary IJ, et al. (2014) Grip Strength across the Life Course : Normative Data from Twelve British Studies. PLoS ONE 9(12) : e113637.

[6] Sarcopenia : European consensus on definition and diagnosis. Age Ageing (2010) 39 (4) : 412-423.

[7] New horizons in the pathogenesis, diagnosis and management of sarcopenia. Age Ageing, (2013) 42 (2) : 145-150.

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